Editoriaux
Éditorial – janvier 2024
« La furor sanandi, pas plus que tout autre fanatisme, ne saurait être de quelque utilité à la société humaine. » Cette mise en garde formulée par Freud en 1915 continue de nous questionner, tant elle avertit notre volonté de guérir du commandement auquel elle obéit, « continue à toujours plus savoir ! ». Cet avertissement constitue une proposition qui n’a rien perdu de son actualité pour celui qui veut bien interroger le malaise dans la civilisation, cet inguérissable que recouvre tout vouloir guérir.
Freud énonce donc une limite à l’endroit de tout fanatisme furieux, limite dont nous pouvons entendre l’écho lorsque Lacan avance dans L’envers de la psychanalyse, cette année mis au travail : ce qui est attendu du psychanalyste, ce n’est pas d’aimer la vérité, c’est de faire fonctionner son savoir en place de vérité. On peut y lire le geste subversif de Freud, qui aura suspendu son savoir de maître – sa furor sanandi – pour inaugurer une écoute, un désir qui ménagent une place et une chance au savoir insu en devenir.
C’est donc à une vérité qui ne peut se dire toute – nouvelle limite à l’amour de la vérité – que nous convoque ce métier impossible de psychanalyser, faisant de ce réel d’un non-savoir le dynamisme du travail de l’inconscient dans la cure. Il n’est pas si fou de prolonger également hors-cure l’exigence de cet engagement, dans les collectifs soignants où nous intervenons à titre de clinicien ou de superviseur, et de faire de l’incomplétude qui marque notre rapport au savoir le soutien du dynamisme du travail collectif.
J’adresse chaleureusement aux membres de l’AfB et de l’enseignement mes meilleurs vœux pour l’année nouvelle.
Que l’Afb puisse être un lieu où s’engage et s’interroge le travail de chacun, avec l’enthousiasme d’un gai savoir.
Clotilde Henry de Frahan
Présidente de l’AfB
Bruxelles, le 10 janvier 2024
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S. Freud (1915), « Observations sur l’amour de transfert », dans La technique psychanalytique, Paris, puf, 4e édition, 1972, p. 30.
J. Lacan, L’envers de la psychanalyse, séminaire 1969-1970, publication ALI hors commerce, p. 120.
Éditorial – Septembre 2023
Comment une association de psychanalyse, se laisse-t-elle travailler par l’instituant qui la traverse ?
Voilà une question par laquelle se laisser interroger, alors que s’ouvre une année de travail pour notre association marquée par la vitalité de ses activités, alors que s’entame une nouvelle présidence et vice-présidence soutenue dans son exercice par un bureau renouvelé.
Répondre à cette question, ne passe-t-il pas par se donner les moyens de transmettre la psychanalyse en tenant compte de ceci, qu’il y a de l’intransmissible à sa transmission ?
Soutenir cela, ce n’est certainement pas loger cet intransmissible à la place d’un idéal, d’un Graal de la transmission : ça nous mènerait à l’impasse.
Cela engage – cela force, dit Lacan –chaque analyste à réinventer la psychanalyse, « d’après ce qu’il a réussi à retirer du fait d’avoir été un temps psychanalysant. Que chaque analyste réinvente la façon dont la psychanalyse peut durer1. »
Notre association AfB se tient-elle vivante de s’efforcer de mettre à la question la façon singulière qu’a chaque membre, quand il engage son désir d’analyse, de réinventer/d’avoir à réinventer, à chaque fois, la psychanalyse ? Mon invitation, à l’ouverture de nos activités, est que cette question trouve sa voie dans nos différents groupes, séminaires, cartels, et en particulier à l’Atelier des membres, cœur battant de l’association qui cette année nous réunira autour de la question du transfert, à partir des interventions des collègues de l’AfB qui participèrent aux journées AfB-ALI d’octobre dernier, « Le transfert à l’épreuve de nos cliniques ». Parions que cet effort de transmission qui n’advient pas sans reste, sans butée sur de l’intransmissible, ni sans énonciation, mobilise, avec la cordialité des échanges à laquelle nous tenons, la dimension du collectif de notre travail associatif.
Clotilde Henry de Frahan, Présidente de l’AfB, 8 septembre 2023
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- Lettres de l’École, n°25, Bulletin intérieur de l’École freudienne de Paris, volume II, La Transmission, juin 1979
Éditorial janvier 2023
L’année 2023 voit notre groupe belge activement au travail sur le Séminaire ‘Encore’ de J. Lacan (1972-73), au sein des différents groupes de lecture et cartels qui se trouvent invités à soutenir leurs questions à l’Atelier mensuel ; celui-ci accueillera le travail collectif notamment autour d’axes théorico-cliniques concernant l’usage que nous faisons du schéma de la sexuation, en vue du prochain Séminaire d’Eté.
Dans le Séminaire précédent, Lacan a évoqué ‘lalangue’ comme une des visées du ‘Savoir du psychanalyste’ : il s’agit de la langue émise avant le langage structuré syntaxiquement.
De la substance pensante à la substance jouissante : lalangue permet à Lacan d’infléchir l’inconscient structuré comme un langage, défini à l’appui du Discours du Maitre et des lois du langage dictées par la métaphore et la métonymie dans la chaîne signifiante, vers l’inconscient proposé comme savoir – faire avec lalangue, révélant un autre registre de l’économie subjective inconsciente, engageant le corps affecté du parlêtre et des traces de jouissance localisées.
‘Un corps, ça se jouit’. Une part de jouissance ne se laisse pas résorber par les opérations signifiantes et symbolisantes. Cinquante ans plus tard, ces propositions de Lacan restent éclairantes pour nos cliniques.
Les livres de nos collègues récemment parus feront l’objet de présentations et discussions dans les prochaines semaines.
Autre temps fort annoncé pour notre travail collectif en mars prochain : une Journée d’étude préparée par un groupe de travail existant de longue date au sein de notre Association : ‘L’inconscient à la barre. Lecture psychanalytique de cliniques de psychiatrie légale’.
Nos instances institutionnelles se mobilisent en particulier cette année quant à la transmission de la psychanalyse en ce temps particulier de transition et de passation quant à nos missions.
Je nous souhaite une très bonne année psychanalytique, ce 1er janvier 2023,
Anne Malfait
Dimanche 01 Janvier 2023